Posséder du gibier (cervidés, suidés) dans les chambres froides des restaurants sans traçabilité est une des non-conformités fréquemment constatées par les inspecteurs d’hygiène lors de leurs contrôles.
Alors comment être en conformité… car oui, c’est possible !
Lisez ce qu’il suit pour savoir “comment faire pour être en règle par rapport à la détention de celui-ci” ?
Quelques définitions
Les chasseurs qui approvisionnent directement le commerce de détail local, qui lui-même fournit directement le consommateur final, en petites quantités de gibier sauvage (attention dans l’état du produit primaire) n’appliquent pas le règlement (CE) n°853/2004 (c’est-à-dire qu’ils ne sont obligés d’être agréés).
Cette activité est donc pas soumise, non plus, aux dispositions du règlement (CE) n°852/2004.
L’importance d’être un produit primaire est primordiale car c’est là que tout se joue !
Un produit primaire est un produit non transformé (voir la définition dans le lexique).
Donc cela sous entend, qu’un gibier en produit primaire est un gibier non déplumé ou non dépouillé qu’il soit éviscéré ou pas.
Le gibier qui a subi une de ces transformations est alors considéré comme une carcasse. Par conséquent, il doit porter la marque de salubrité (estampille). Cette estampille est apposée par un vétérinaire officiel comme le définit le règlement (CE) n°852/2004 au chapitre III de l’annexe I.
Le restaurateur ne doit pas accepter :
- de recevoir un gibier dépouillé ou plumé ;
- un gibier qui soit ou ait été congelé ;
- que le gibier ne soit pas accompagné de la fiche de compte rendu d’examen initial remplie par la personne formée à la réalisation de ce type d’examen ;
- que le gibier sauvage ne soit pas identifié, individuellement pour le grand gibier, individuellement ou par lot pour le petit gibier. Le numéro d’identification est reporté sur la fiche mentionnée ci-dessus ;
- que les carcasses de sanglier ne soient pas accompagnées par la fiche d’accompagnement des prélèvements, dans le cadre de la recherche des larves de trichine réalisée à l’initiative du détenteur de la carcasse de sanglier. Cette fiche comporte la signature du laboratoire et le résultat du test trichine qui doit être favorable ;
- que le gibier sauvage provienne d’un lieu de chasse distant de plus de 80 km de l’établissement livré.
Arrêté du 21 décembre 2009 relatif aux règles sanitaires applicables aux activités de commerce de détail, d’entreposage et de transport de produits d’origine animale et denrées alimentaires en contenant, annexe VIII – dispositions applicables aux petites quantités de gibier sauvage.
Points que vous devez vérifier lors de la remise du gibier
Le terme de « petites quantité » est défini dans l’arrêté du 18 décembre 2009, ainsi que les conditions à respecter par le chasseur.
Dans la section IV sur les exigences applicables à la petite quantité de gibier sauvage remise directement et localement par le chasseur au commerce de détail local fournissant directement le consommateur final, sont :
- La petite quantité de gibier que le chasseur peut remettre directement au commerce de détail local correspond au gibier tué au cours d’une journée de chasse réalisée par ce chasseur.
- Le chasseur peut remettre cette petite quantité de gibier sauvage directement au commerce de détail fournissant directement le consommateur final situé dans un rayon de 80 kilomètres établi depuis le lieu de chasse. Toutefois, dans le cas de lieux de chasse situés dans des zones soumises à des contraintes géographiques particulières, le préfet peut autoriser une livraison à une distance supérieure.
- L’ensemble du petit et grand gibier sauvage remis directement au commerce de détail fournissant directement le consommateur final doit satisfaire aux exigences suivantes :
- Etre identifié individuellement pour le grand gibier ou par lot pour le petit gibier et de manière unique afin que la traçabilité puisse être assurée depuis la mise à mort sur le lieu de chasse jusqu’à la remise au consommateur final.
- Le numéro d’identification attribué à chaque pièce ou lot de gibier doit commencer par le numéro du département dans lequel le gibier a été chassé, puis être complété par le numéro d’ordre de la pièce ou du lot de gibier. Dans le cas des espèces soumises à un plan de chasse, le numéro d’identification sera le numéro du dispositif de marquage du plan de chasse à condition qu’il soit unique dans le département.
- Cette obligation de traçabilités’appliquera à compter de la publication du présent arrêté en ce qui concerne le grand et le petit gibier.
- Les informations relatives à la traçabilité de chaque pièce ou lot de gibier doivent pouvoir être contrôlées par les services vétérinaires. Les informations devant accompagner la pièce ou le lot de gibier sont les suivantes :
- Nom du chasseur ;
- Espèce de gibier ;
- N° identification de l’animal ou du lot d’animaux ;
- Lieu de mise à mort par action de chasse ;
- Date de mise à mort par action de chasse ;
- Destination de la pièce ou du lot de gibier.
4. La dépouille ou plumaison par le chasseur avant la cession au commerce de détail est interdite. La cession au commerce de détail fournissant directement le consommateur final ne concerne que des pièces entières de gibier sauvage. La découpe de gibier sauvage non dépouillé ou plumé est interdite exception faite lors de la chasse en montagne lorsque le transport du grand gibier s’avère impossible sans une découpe préalable de l’animal.
5. La dépouille ou la plumaison de gibier sauvage est possible chez les détaillants remettant directement la viande au consommateur si elle est effectuée selon les bonnes pratiques d’hygiène.
6. La congélation de gibier sauvage non dépouillé ou non plumé est interdite.
7. La remise directe au commerce de détail local fournissant directement le consommateur final, par le chasseur, d’abats de gibier sauvage est interdite dans la mesure où ceux-ci n’ont pas subi l’inspection post mortem en établissement de traitement.
8. Le gibier sauvage remis au commerce de détail local fournissant directement le consommateur final doit, s’il s’agit d’une espèce sensible à la trichinellose, avoir fait l’objet d’une recherche de larves de trichines sur le gibier.
Voici LA fiche d’accompagnement du gibier :
Ces règles sont dues à la trichinellose.
La trichinellose est une maladie due à un parasite.
Ce parasite est ingéré sous forme de larve par une espèce sensible à la trichinellose, qui sous l’action de l’acide gastrique dissout l’enveloppe protégeant les larves. Ces dernières sont alors libérées dans le tube digestif de l’animal. A l’âge adulte, ces larves s’accouplent et déposent leurs œufs dans la muqueuse de l’intestin. Ces œufs vont alors être transportés grâce au système lymphatique et sanguin de l’animal jusqu’aux muscles de celui-ci.
Ci par la suite, l’animal abattu et que la viande est mal cuite, nous sommes à notre tour parasité. En effet, nous faisons aussi parti de ces espèces sensibles à la trichinellose.
Donc les espèces sensibles à la trichinellose sont les espèces omnivores ou carnivores tel que le porc (surtout plein-air), le sanglier et les équidés.
Vous comprenez maintenant mieux pourquoi l’Europe impose à tous une traçabilité du gibier sauvage.
Conservation du gibier dans la chambre froide
Maintenant que vous avez tout vérifié et que vous avez établi la traçabilité du gibier. Il vous faut correctement le conserver jusqu’au moment de son utilisation.
Les températures de conservation du gibier sont :
- Pour le gibier ongulé (d’élevage ou sauvage) la température maximale acceptable est de + 3 °C.
- Pour les viandes de volailles (y compris petit gibier d’élevage à plumes), de lagomorphes (y compris petit gibier d’élevage à poils), de ratites et de petit gibier sauvage, la température maximale est de + 4 °C.
- Pour les viandes d’ongulés domestiques, viandes de gibier ongulé (d’élevage ou sauvage), il faut une conservation à une température de :
- +7 °C pour les carcasses entières et pièces de gros ;
- + 4 °C pour les morceaux de découpe (si vous le découpé le gibier et que vous n’utilisez pas entièrement).
Je pense que vous avez vu ici la différence de température entre “gibier ongulé” et “viande de gibier ondulé”. Cela sous entend, qu’après que le restaurateur ait nettoyé le gibier, il peut le conservé à la température indiquée pour les viande de gibier sauvage.
Voilà, j’espère que j’ai pu éclairer votre lanterne sur ce point.
Avez-vous des questions ?
Référence : Note de service du ministère de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire du 08 mars 2012
Crédit photos : © Fotolia.com
Bonjour,
Les nuisibles entrent-ils dans la catégorie ‘gibier’ ?
Autrement dit, si un restaurateur met du ragondin sauvage à sa carte, celui-ci doit-il être fourni par un piégeur agréé ? Et dans ce cas, les procédures de traçabilité sont-elles les mêmes ?
Par avance merci,
Cordialement,
Bernard.
ce qui m’interpelle le plus,outre la complexité de la donne,tant pour le chasseur que pour le restaurateur sont les nombreuses fautes dont le commentateur fait part! En effet force est de constater que tout le monde y va de ses propres fautes(ou de fautes qui lui sont propres) et tout le monde trouve cela naturel,à quoi bon s’emmerder?
Bonjour Bernard,
On ne mange pas de nuisibles.
Le ragondin est dans ce cas là considéré comme petit gibier sauvage (personnellement je ne pensais pas qu’on pouvait le manger).
Par conséquent, il peut-être chassé et donné à votre restaurant (si vous en avez un). Le piégeur est un chasseur et il n’y a pas d’obligation d’être agréé du momen tque cela se fasse en petite quantité et à une distance de 80 km autour du restaurant.
Pour la traçabilité c’est exactement la même procédure où sur une feuille il est noté :
– Nom du chasseur ou du piégeur ;
– Espèce de gibier ;
– N° identification de l’animal ou du lot d’animaux ;
– Lieu de mise à mort par action de chasse ;
– Date de mise à mort par action de chasse ;
– Destination de la pièce ou du lot de gibier.
ESt-ce que cela répond à votre question ?
Bonjour,
Merci,
Le ragondin peut avoir les deux statuts, gibier et être chassé, nuisible et être piégé par des piégeurs agréés (qui ne sont pas forcément chasseurs).
http://www.seineenpartage.fr/webmanager/contentimages/doc640.pdf
Concernant l’aspect organoleptique de la bête, c’est très fin avec un léger goût de poisson de rivière.
Cordialement,
Bernard.
Merci Bernard pour la documentation… je pense que je vais faire une petite chronique sur ce point car c’est interessant.
Où peut-on manger du ragondin ? DAns quelle région de France ?
Merci d’avance 😉
Bonjour,
On peut manger du ragondin un peu partout, puisqu’il est présent dans plus de 70 départements
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ragondin
et continue d’être élevé, non plus réellement pour sa fourrure comme au siècle dernier, mais pour sa chair :
http://www.alimentaire-pro.com/reportages/elevage_de_ragondins_bruneteau.php
Mais il est à noter que les restaurateurs le présentent souvent sous l’appellation Lièvre des marais ou Myocastor pour éviter la symbolique ‘Rat’ !
A lire également, document de synthèse ancien, mais intéressant :
Cordialement,
Bernard.
Bonjour,
Merci pour toutes ces infos très interessantes !
Cordialement,
Vrine
En effet il parait que le ragondin est bon… en tout cas j’en ai déjà entendu parler dans l’Aube.
J’ajouterais que pour éviter de faux négatifs aux recherches de Trichines la congélation (21 jours à -21°C) élimine les larves de T. britovi .
Pour une conso personnelle je congèle quasi systématiquement les produits de la chasse ne serait-ce que pour le Ténia ( 10 jours à -10°C) ce qui permet de consommer de jeunes bêtes rosé: pierrade…
Vu le régime du Ragondin, à défaut de le congeler une bonne cuisson s’impose, le minima contre la trichinelle est de 10 min à 58°C à coeur- à vérifier je ne me rappelle pas d’où je sais cela !
Merci pour ce blog que je découvre! et qui est très bien documenté, référencé…
Bonjour Céline,
Merci à vous de le lire…cela me motive à continuer à écrire.
L’infos sur la congélation pour tuer les parasites est très intéressante.
A bientôt
Bonjour,
Attention, certaines espèces de Trichinella résistent très bien à la surgélation, seule une cuisson bien maitrisée les détruit.
http://umvf.univ-nantes.fr/parasitologie/enseignement/trichinellose/site/html/cours.pdf
http://www.efsa.europa.eu/fr/scdocs/doc/trichinella-fr1,0.pdf
Par contre, une cuisson à coeur en dessous de 60°C pour ce genre de bestiole et en général pour les produits à risque, il vaut mieux éviter…
Cordialement,
Bernard.
Bernard, vos commentaires sont riches d’information… Merci pour votre recherche et le partage que vous faites avec nous.
J’hâte de lire d’autres commentaires sur les prochains articles !! 😉
Cordialement,
Vrine
Bonjour,
Après service véto et après avoir été dépouillé comme il se doit, est il possible de congeler des morceaux de gros gibier (sanglier) ?
Si oui, combien de temps est il possible de les garder congeler ?
Merci pour vos retours,
Non, vous ne pouvez pas congeler des morceaux de gros gibier !
Car, la réglementation impose, par rapport au gibier, que ça soit le restaurateur qui dépouille, déplume, éviscère, … le gibier.
Or, on ne congèle jamais un gibier avec ses viscères !
De plus, vous ne pouvez congeler que des denrées alimentaires qui sont déjà conditionnées. C’est-à-dire du gibier vendu par une entreprise agroalimentaire.
Bonsoir,
je viens de lire l’article ci-dessus qui ne répond pas à mon questionnement.
J’ai une maison d’hôtes et je propose la table d’hôtes à mes clients.
Parfois des chasseurs/pêcheurs dans mon entourage me donnent des pièces de gibier congelées,ou des truites fraichement pêchées.
Mes clients sont ravis de déguster, de découvrir les plats que je leurs cuisine avec.
La règlementation dans notre catégorie professionnelle est bien différente de celle des restaurateurs.Nous ne sommes pas soumis à la même traçabilité concernant les produits utilisés.
Pourriez-vous donc me préciser ce qu’il en est pour les tables d’hôtes.
Merci.
Bonjour Isabelle,
La traçabilité est la même pour tout le monde quelque soit votre catégorie professionnelle.
La traçabilité a pour objectif de retirer les aliments (pour l’homme ou animaux) comportants un risque (=>retrait ou rappel).
Et c’est chaque entreprise : importateur, producteur, distributeur, doivent pourvoir retracer ses aliments.
La différence que je voir avec les tables d’hôtes, c’est que les tables d’hôtes répondant à l’ensemble des conditions suivantes :
* constituer un complément de l’activité d’hébergement,
* proposer un seul menu et une cuisine de qualité composée d’ingrédients du terroir,
* servir le repas à la table familiale,
* offrir une capacité d’accueil limitée à celle de l’hébergement ;
Si l’un de ces critères n’est pas respecté, il s’agit alors d’un restaurant, soumis aux dispositions relatives à l’obligation de formation Hygiène Alimentaire.
Ensuite, le gibier doit être fournis entier (càd avec la peau). Donc pas d’agrément sanitaire nécessaire.
Bonne journée à vous,